lundi 22 avril 2013

Ansabère : couloir Garroté

Enfin j'installe mon dernier relais, à quelques mètres de la sortie, et je sens les rayons du soleil me caresser l'échine. Maintenant, c'est certain ,je peux mettre la croix à cette course que nous avons trouvée technique, assez soutenue et engagée. Le spectre du but n'est plus d'actualité et je peux me relâcher tout en faisant monter Olivier et Louis.
A vrai dire, à la vue du dernier ressaut, le doute de la réussite nous a saisi. Vu du bas, ce dernier passage surplombant semble infranchissable. Mais est ce bien par là qu'il faut passer?  Je me remémore les photos de Rémi lors de son ascension avec des clients. Il faut bien passer ce bloc coincé.
Je prends le temps d'observer et vois des possibilités de protections. Au pire, j'artif et fais parler le gancho.
Et puis peut être qu'il y aura de bonnes surprises.

La rampe qui mène au dernier ressaut


La victoire ne peut plus nous échapper malgré l'arrivée du brouillard


Arrivé sous le surplomb, des traces de lutte sur le rocher de droite: le passage est là. Après quelques coincements de lames et placements des mono pointes dans les trous, je me retrouve au dessus du bloc, satisfait et soulagé. Maintenant, autour des autres.

Olivier dans la sortie du dernier ressaut.


Le dernier relais avant la sortie



Notre aventure commence tôt ce dimanche matin avec une marche d'approche  facilitée  par une neige au top, bien portante.


Nous remontons les 30 premiers mètres du couloir pour faire un relais un peu en dessous du premier ressaut en glace.de suite, on se rend compte que les conditions sont excellentes. Je jubile de cette délicatesse de la nature quand je constate que j'ai oublié les broches : çà commence bien. Il  faudra faire marcher le moral.

Première moitié de la longueur



Après ce premier passage, il faut partir à gauche pour grimper en glace une cheminée assez profonde, qui se raidit franchement (75°). Le haut est alors fermé par un bouchon de neige qui m'oblige à passer sur le caillou de gauche et me rétablir sur le dessus du bouchon ( moment émotion et ...de solitude). A chacun sa méthode pour passer, mais il y aura quelques couinements.

Olivier à la sortie de la cheminée;


Puis vient ensuite la longueur méga connue, où les grimpeurs passent dans un trou de souris pour sortir par un tunnel.
De même, ce fameux trou est recouvert par un bouchon de neige qui m'oblige à aller chercher très haut de bons ancrages sans possibilité de bien me protéger. Je réussis tout de même à enfoncer un piton de son tiers, piton qui coutera un piolet à Louis. Eh oui, la ficelle pour le rôti, c'est pour le rôti.

Sortie de la 3ème longueur après le tunnel


La longueur suivante est celle où se trouve le pas en A1. Aujourd'hui, la glace recouvre le rocher et le pas de A1 n'est pas au plat du jour. Cette longueur de plus de 50m a été la plus éreintante pour moi. La partie finale est à 80°, sur une glace un peu pourrie par la neige. Parfois, les piolets enfoncent jusqu'à la garde et jouent des castagnettes dans leurs trous.Les broches ne me manquent pas puisqu'elles seraient inefficaces sur ce genre de structure.Par quelques contorsions, qui défient la loi de la gravité, j'arrive à planter un piton salvateur, sur la paroi opposée, seul moyen de protection sur plus de 10 mètres avant d'atteindre le vieux spit et de le clipper avec un grand soulagement. Je me dis alors qu'aujourd'hui il ne peux rien m'arriver et pense à Louis qui doit faire la même chose avec un seul piochon.



Une longueur plus facile, avec un passage plus raide de plusieurs mètres, en bonne glace, nous dépose dans un petit cirque, au pied du dernier bastion.




C'est heureux et satisfaits de notre tache, que nous prenons pied sur les pentes terminales du pic d'Ansabère.
Merci à Louis qui a joué le photographe et encore bravo car il a fait la moitié de la voie avec un seul piolet;



Nos impressions: course engagée dans le sens qu'il faut tout poser avec des zones peu évidentes pour la protection: beaucoup de pitonnage Course assez soutenue avec son lot de surprise technique à chaque longueur.
Prévoir 10 pitons variés dont des lames, un jeu de friends jusqu'au n°2 pour les camalots , un jeu de coinceurs et 3 broches pour le confort.

lundi 15 avril 2013

Montanesa : une voie en gestation

Il y a des blogs qui me font rêver et surtout qui ont le pouvoir ou le don de juste me ... donner envie de faire. C'est le cas avec celui de Julien Lacrampe, alpiniste de haut vol et surtout un sacré funambule en "artif".
Pour ce weekend, je propose donc à Jean Pierre d'aller taper des clous et de se pendre sur les crochets.
Avec ma motiv' perso et son ardeur d'ouvreur de voie, nous prenons la direction de Montanesa pour aller essayer de tracer une nouvelle ligne sur la mythique paroi du coin: le Penpenus. 

Le massif de la Pena Montanesa et sa mythique paroi


Notre objectif est la cheminée complètement à droite


C'est donc avec plein de vigueur et surtout chargés comme des bourriques que nous remonterons durant 45 minutes le beau sentier qui mène au point culminant du massif , pour le laisser au dépend de pierriers infâmes et bien croulants.Je me rappelle d' avoir dis à JP que sa paroi doit être mythique que pour les sangliers du coin et que très peu de grimpeurs doivent venir se faire "chier" ici après plus de 2 heures d'une approche fastidieuse.
Et bien rien que ce  weekend, nous y croiserons 2 cordées, et pas des moindres, juste l'élite nationale espagnole équivalent  à nos groupes Excellence. Du haut niveau super beau à voir grimper dans la fameuse voie de C. Ravier " Passe muraille". Une leçon de grimpe...

Le haut niveau à l’œuvre: superbe





Pour notre aventure à nous, JP met la stratégie suivante en place: les longueurs dures où il faut "artifer" c'est pour ma pomme et lui pour des raisons d'épaule soi disant douloureuse, se tape les longueurs qui roulent. Facile  la stratégie de JP, non?
Donc, d'entrée de jeu, c'est pour moi.
Une partie de cette première longueur est commune à une voie déjà en place dont j'ai oublié le nom.
Je la remonte jusqu'à son mur équipé de 3 spits (  ne pas clipper ce dernier)  pour ensuite faire une traversée à droite en logeant une écaille et prendre des rampes qui mènent sur une terrasse. Première longueur, premier vol plané, premières sueurs froides et premières cartouches Chance cramée.

La future voie


Première longueur



Le terrain se couche un peu et donne de l'inspiration à mon compère
Deuxième longueur qui tourne autour des 50 mètres avec peu de points de protection, sur un caillou  aux prises rondes par endroit, pour finir dans un superbe mur . Il est fort ce JP.





La troisième longueur est bien pourvue en prises avec un pas un peu plus difficile en traversée qui mène à une terrasse pour  finir sur un becquet bien confortable, au pied d'un mur gris compact.
Pour un court instant, je me suis pris alors pour Julien Lacrampe. Ne souhaitant pas spiter, j'arrive à planter un piton d'un tiers de sa longueur, la tête vers le bas, dans un trou, puis à monter tout doucement dessus.J'en plante un autre , un peu dans le même style et arrive à atteindre une micro fissure où je place un crochet et me suspends dessus. Et puis ,sans savoir pourquoi, le crochet se barre. Dans ma chute, je vois le piton du haut qui saute et la terrasse qui se rapproche à vitesse grand V. Je me dis que je vais prendre une sacrée gamelle, lorsque d'un coup je suis stoppé net. En détendant mes jambes, je touche la terrasse et peux me remettre droit. Par je ne sais quel miracle, le premier piton a tenu bon et pourtant je n'aurai pas parié dessus.
Deuxième longueur en tête, deuxième vol, deuxième sueurs froides.


La troisième longueur




JP arrivant au niveau de la terrasse qui m'a chatouillée les pied lors de mon dernier vol


Le mur que j'ai commencé en artif


Autant dire qu'après, j'étais vidé de mes forces et surtout plus envie de continuer. A vrai dire , j'ai pris une grosse baffe au point de demander à JP de prendre les choses en mains pour trouver une solution de passage puis de redescendre ensuite.
Du coup, je mets un spit pour assurer notre sécu, jumelé au piton salvateur et JP descend une sorte de rampe pour voir si on peut trouver une ligne de faiblesse en contournant le mur.

A la recherche d'un point de faiblesse


Après avoir laissé le matos à R1 et fixé les cordes pour remonter le lendemain, nous redescendons au fourgon.
La nuit ne fut pas réparatrice pour les deux lascars et nous décidons de mettre une fin temporaire à notre ascension.
Nous nous retapons la montée puis avec sa délicatesse légendaire, JP me laisse remonter à R1 pour récupérer tout le matos.


Nous passerons notre dimanche à visiter le massif tout en repérant quelques possibilités d'ouvertures ( enfin surtout JP)

La pena Montanesa, un sacré mais joli massif.