Fin d'aprèm, on débarque nos fesses sur les crêtes, ventées par un vent du Sud dément.
En bas, dans la plaine, les lumières des villages et des villes s'allument petit à petit comme des vers lumineux tandis que le ciel s'assombrit sérieusement.
A la cabane, Henry est descendu après nous avoir observé un long moment et nous avoir encouragé dans notre reptation verticale.
Henry, c'est un sacré bonhomme. C'est un peu le père, le pâtre du coin avec toutes ses attentions pour les promeneurs et les alpinistes(balisage du sentier, cabane, père Noël), mais aussi l'ouvreur de pratiquement toutes les voies de grimpe du secteur (et ces temps ci, il en a défloré un paquet). Sa montagne d'Areng, il se la bichonne et il la connait par cœur.
La dernière fois que nous sommes venus avec Jean Pierre, celui ci, coutumier du fait, repère une ligne à droite du couloir Fanou. Elle suit une fissure plus ou moins large très rectiligne. Après renseignement auprès de Henry, elle n'est pas ouverte et cela fait l'effet d'une bombe chez notre marsupilami souletin.
A partir de ce moment, irrémédiablement, le processus est enclenché.
D'abord, cette vision liée à un fantasme chronique va lui bouffer un paquet de neurones puis ensuite par ricochet c'est lui qui va me bouffer le cerveau par harcèlement moral.
Il lui aura juste fallu deux mois pour que je craque, sachant que j'adore le dry et le mixte et que mes piochons sont restés au chaud durant cet hiver estival.
Cette fois ci, l'approche est minimalisée puisque nous avons remonté la piste dans son intégralité, grâce dixit JP à son pilotage.
A la cabane, on se rend compte qu'ici la neige ne nous a pas attendu et que notre ligne est plutôt sèche à très sèche; un peu logique vue la raideur du bastion.
Le massif du coin
Et la fissure dans le bastion à droite de Fanou qui démarre tout en bas.
Le topo
Cette première longueur va vite nous donner le ton. Les touffes d'herbe et de motte sur lesquelles on compte pour progresser vers le haut ne sont pas gelées et ont tendance à se barrer quand on y met un poids divers ou un petit coup de piochon.
D'entrée de jeu, le pulse monte dans les tours et la moindre micro fissure est bénie. Il me faudra monter bien haut avant de pouvoir mettre un point sûr .
1er ressaut
Après la première terrasse, j'entame le deuxième gros morceau qui consiste à remonter une ligne de fissures verticale garnie à souhait de morceaux de jardin, mais assez vite le doute s'installe avec ce gel fantôme qui ne permet pas de bons ancrages. Je redescends tant qu'il en est encore possible pour aller relayer au pied d'un arbre et faire monter JP.
Jean Pierre à la sortie du premier ressaut
Après discussion, on décide de continuer et je repars pour m'endosser le rôle de Nicolas le Jardinier avant d'interpréter formidablement bien celui de "l'homme qui tombe à pic".
Au fur et à mesure de ma progression, les mottes ayant reçu un coup de piolet se font la valise lorsqu'elles font connaissance avec mes crabes.Parfois, leur désertion permet de mettre à jour des possibilités de coincements de lames pour les piolets et les mono pointes
Le bas du deuxième ressaut
Plus haut, je fourgue un piton et estime ses probabilités d'arrachage quasi nulles. A la théorie, il suffit d'y ajouter la pratique. Chose faite, il a tenu.
Je repars, arrive à accéder à l'endroit qui permet de passer de l'autre côté de la fissure cheminée pour ensuite laisser ma place à JP.
La "kich" au niveau de l'enjambement. Photo prise par Henry
JP commence peu confiant ( ce qui a le don de bien me marrer) mais petit à petit il se concentre et sous les encouragements de Henry qui nous observe il trouve la solution pour passer le dernier obstacle et faire un bon relais sur arbre.
JP au départ de L2. Regardez bien, il en tremble de confiance.
Dans un pas dur en haut de L1 (photo de Henry)
L3 se présente sous de meilleurs hospices avec un sol un peu plus gelé. La partie médiane est très intéressante avec sa série de coincements de lames sur le bord gauche. On peut attaquer le couloir directement ( accès difficile ce jour mais avec plus de neige cela doit être juste qu'une formalité) ou grimper d'abord par la gauche(cela parait simple mais ce ne l'est pas ) pour revenir dedans plus haut.
Bas de L3
Partie médiane ( ne pas compter sur les touffes d'herbe à droite car le caillou est juste dessous)
L4 Les difficultés sont terminées. On remonte au mieux pour aller faire relais au pied de l'arête et juste au dessus du couloir Fanou.
La dernière longueur passe derrière l'arête pour aller rejoindre un couloir facile qui domine Fanou et terminer sur les crêtes
Début de soirée, on retrouve la voiture, fiers comme des papes.
Si l'aventure vous intéresse, prendre un jeu de friends, de micro et voire 2 ou 3 pitons au cas ou.
Christian Ravier a dédié une voie à Barrio à Ansabère, connaissant son amour pour cette montagne. Il l'a surnommée Barrioland.
Nous connaissons l'amour que porte Henry à cette montagne d'Areng et nous voulons lui dédié cette nouvelle ligne: "Fioccoland" naquit sous ses yeux comme un père qui assiste à la naissance de son enfant.
C'est sûr, on reviendra.
Excellent, tu as refait mon topo! Et chose exceptionnelle je crois que je préfère le mien...
RépondreSupprimerFaut que je me méfie pour le harcèlement moral, ça va chercher loin cette histoire auprès des juges!
The Pilot
Je n'ai pas pu imprimer le tien alors j'ai du en refaire un . Pour le harcèlement moral, parfois il y a du bon: la preuve.
RépondreSupprimerIncroyable!!! tu as avoué avoir été bluffé par ma grimpe et en plus sur le net; comme quoi, parfois toi aussi tu me surprends.
Bonne semaine The Pilot